Discours du président de la Fédération, Éric Faure, 29 septembre 2018
Allocution du colonel Éric Faure, président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF), à l’occasion de la venue de monsieur Gérard Collomb, ministre d'État, ministre d'Intérieur, au 125e Congrès national des sapeurs-pompiers de France à Bourg-en-Bresse (Ain), samedi 29 septembre 2018.
Discours
Le discours du président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, Eric Faure, est disponible en replay.
(Seul le prononcé fait foi)
Monsieur le Ministre d’État, ministre de l’Intérieur,
Madame la Vice-présidente du Sénat, présidente du Conseil national des sapeurs-pompiers volontaires, Chère Catherine TROENDLE
Monsieur le député, co-président du comité d’organisation, cher Damien ABAD,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le président de la Conférence nationale des services d’incendie et de secours, Cher Olivier RICHEFOU,
Monsieur le Président du Conseil départemental de l’Ain,
Monsieur le Maire de Bourg-en-Bresse,
Mesdames et Messieurs les élus
Monsieur le Préfet, Directeur Général de la sécurité Civile et de la Gestion des Crises,
Mesdames et messieurs les représentants des corps constitués,
Chers Présidents d’Honneur (Bernard, Daniel, Richard),
Chers amis sapeurs-pompiers et personnels des SDIS et de la Sécurité civile,
Mesdames, Messieurs,
Quel plaisir de vous accueillir, Monsieur le Ministre, dans ce département de l’Ain, fleuron de notre filière industrielle mais aussi emblème de notre modèle d’incendie et de secours :
- Par son maillage territorial ;
- Par la complémentarité qui unit sapeurs-pompiers professionnels et volontaires ;
- Et par la coproduction entre service public et réseau associatif, dont témoigne la superbe organisation de ce congrès.
Merci à vous, chers amis aindinois et aindinoises, ainsi qu’aux partenaires privés et publics qui se sont mobilisés à vos côtés.
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En 1990, notre Fédération imaginait les pompiers du futur en publiant une bande dessinée : 2018 : les héros de l’impossible
2018 : nous y sommes.
Nos anciens ont été clairvoyants sur les mutations de notre communauté : la départementalisation ; la pluralité de nos missions ; le développement des secours spécialisés ; la création d’une force européenne de protection civile ; l’enseignement généralisé des gestes qui sauvent.
Ils avaient tout prévu.
Tout sauf une chose : l’explosion du Secours d’urgence aux personnes.
Car c’est bien d’une explosion dont il faut parler.
Cette mission représentait à l’époque un tiers de nos interventions, elle en représente aujourd’hui 84% alors même que leur nombre total a doublé.
Et cela ne fait que s’accélérer : + 40% en 10 ans. Depuis janvier, cette progression est de 10% dans nombre de départements.
Les causes en sont bien connues : une demande sociétale de plus en plus impérieuse, diverse, pressante.
Mais encore, un délitement des solidarités traditionnelles, un système de santé en crise, une offre de soins rare et inégalitaire.
Sans oublier, les politiques ambulatoires en matière de dépendance où tout est prévu… ou presque : au moindre aléa, les sapeurs-pompiers deviennent la variable d’ajustement.
Face à ces constats, et pour ne pas rendre impossible notre engagement, il faut un changement complet de paradigme.
Pour cela, une triple transformation est nécessaire.
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La première est celle de la politique publique du Secours d’urgence aux personnes
Elle doit être profonde et globale, et commence par une prise de conscience.
Le « soldat du feu » est progressivement devenu un généraliste du secours et, désormais, tout en continuant à lutter contre l’incendie, l’acteur majeur du Secours d’urgence aux personnes, voire même, souvent, le dernier.
Quand la vie est menacée, la douleur insupportable…
Mais aussi pour répondre aux détresses sociales, psychologiques ou psychiatriques…
Ou, tout simplement, pour ceux que nul autre ne peut ou ne veut prendre en charge.
Partout : en zone urbaine ou rurale, même les plus hostiles.
Dans l’eau, en montagne, en milieu toxique, face au terrorisme… et jusque dans les établissements de santé, où on nous appelle régulièrement, Monsieur le Ministre, pour prendre en charge des malaises.
Clairement, cette nouvelle politique publique s’articule autour de deux enjeux majeurs :
- la demande de secours du citoyen à travers son appel téléphonique,
- et la réponse que nous allons lui apporter.
La demande de secours. C’est bien sûr, la question des numéros d’appels d’urgence.
Pour moderniser et simplifier la réponse, le président de la République l’a encore rappelé il y a quelques jours, il existe un moyen : réunir les acteurs et les 13 numéros actuels autour du 112, comme partout en Europe.
Cette réponse unifiée apportera :
- Un décroché rapide et efficace, inférieur à 30 secondes, à la totalité -je dis bien la totalité ! - des appels, sans perte de temps ni d’information entre services ;
- Un tri entre demandes urgentes et non-urgentes ;
- L’engagement immédiat des secours en cas d’urgence avérée ;
- Enfin, un transfert des appels non-urgents au centre opérationnel du service compétent : pompiers, police, gendarmerie, hôpital.
Ces plateformes doivent s’organiser au niveau départemental, car lui seul permet :
- Une création à budget constant, à travers notamment la mise en commun des actuels opérateurs du 18, du 15 et des 17 ;
- Le maintien du service public de proximité, favorisant l’adhésion politique et sociale au changement ;
- Un regroupement physique plutôt que virtuel, plus à même de développer des synergies entre les acteurs.
Depuis 2004 dans ce département, une telle plateforme regroupe le 15 et le 18. Et cela marche ! A tel point que sa version N°2 est en construction pour être encore plus de performance.
A Paris, immanquablement, on nous rétorque l’opposition des SAMU.
Vous le savez, parmi eux, l’AMUF présidée par Patrick PELLOUX est totalement en phase avec nous.
Le second syndicat, longtemps opposé, vient d’afficher un timide signal d’ouverture vers le 112.
Mais, dans le même temps, il souhaite qu’une réponse téléphonique puisse être maintenue par l’hôpital.
Aujourd’hui, 95% des appels au 15 ne relèvent pas de l’urgence, mais concernent un besoin d’assistance, de soins non programmés ou un conseil médical.
Alors, comme le préconise le député Thomas MESNIER : confions ce volet à une plateforme santé dotée d’un numéro dédié. Il propose à cet effet le 116117.
Une plateforme départementale 112 pour les urgences vitales, interfacée avec une plateforme santé 116117.
Voilà une architecture à la fois lisible pour nos concitoyens, efficace et budgétairement soutenable !
Voilà de quoi inspirer la réorganisation importante annoncée par le chef de l’État d’ici la fin de l’année, et à laquelle nous sommes prêts, Monsieur le Ministre, à vous aider !
Ensuite, une fois réceptionné l’appel au secours, il faut se pencher sur la réponse que nous allons lui apporter.
Sortons des vieilles représentations et des schémas dépassés !
Les sapeurs-pompiers ne sont pas de simples brancardiers – Des « effecteurs du relevage » comme l’écrit trop souvent pompeusement la santé.
L’organisation actuelle qui nous place comme des sous-traitants des SAMU, et dans laquelle les SDIS comblent et paient les carences de la Santé, a vécu !
Daté des années 80, cet édifice normatif est obsolète.
Conçue pour mieux hospitaliser, la régulation médicale est devenue bloquante.
Chaque jour, nous subissons la saturation des centres 15 et des urgences hospitalières, qui imposent des délais d’attente sans cesse plus longs :
- pour répondre au citoyen quand il appelle le 15…
- pour nous répondre quand nous leur transférons un appel,
- pour la transmission des bilans,
- pour la prise en charge des victimes que nous amenons à l’hôpital.
Au quotidien, nous effectuons seuls la quasi-totalité des missions de secours d’urgence aux personnes. Le SMUR est avec nous moins d’une fois sur 10. Ce n’est donc plus une mission partagée !
C’est une mission sapeur-pompier, avec appui possible des SMUR !
Nous devons en tirer les conséquences !
Tout d’abord, dans nos services, où la prise en compte du Secours d’urgence aux personnes doit devenir une priorité stratégique.
Certes : une meilleure indemnisation de nos interventions pour carence ambulancière est une préoccupation légitime.
D’autant que nous est toujours refusée la possibilité de requalifier et de facturer a posteriori ces interventions.
Mais le Secours d’urgence aux personnes ne peut se réduire à cette seule question !
L’ensemble de nos organisations doit être adapté et orienté autour de lui :
- nous devons être présents auprès des ARS,
- l’encadrement des SDIS doit mettre dans le Secours d’urgence aux personnes autant d’énergie qu’il en met sur les autres enjeux opérationnels,
- nous devons renforcer notre pilotage à travers des indicateurs d’activité performants.
Notre pratique, notre technicité, notre savoir-faire – et donc notre logique de formation - doivent également évoluer, et être reconnus.
Les sapeurs-pompiers, hier secouristes, doivent pleinement devenir LES techniciens du secours d’urgence aux personnes.
Pas pour en faire des infirmiers ou des paramedics.
Mais pour pratiquer des gestes permettant une prise en charge plus rapide et plus efficace des victimes.
Parce que, clairement, si on ne le fait pas, qui le fera ? … au moment où de nombreux SMUR ferment dans les départements.
Nos chefs d’agrès, notamment, y trouveront efficacité et humanité dans leurs mission.
Pour les professionnels, c’est aussi une perspective de montée en compétence qui émerge au moment où certains ne cessent de dire que leur filière métier va dans le mur.
Pour cela, il nous faut, Monsieur le Ministre, briser les carcans réglementaires et bousculer les conservatismes dont notre pays s’est fait une spécialité.
Deux exemples.
- Alors que chaque diabétique peut se procurer en pharmacie un appareil de mesure de glycémie capillaire, son usage n’est pas autorisé aux sapeurs-pompiers !
- A l’heure de la télémédecine, pourquoi tarde-t-on à équiper nos VSAV pour réaliser des électrocardiogrammes ?
Dans la relation avec la régulation médicale, faisons bouger les lignes pour les bilans transmis. Nombre d’entre eux n’ont assurément pas le besoin d’être traité par un médecin. Ils ne le sont d’ailleurs pas, puisque c’est l’ARM qui répond, avec pour indication d’évacuer la victime toujours vers le même service des urgences !
Soyons désormais autonomes pour ces bilans simplifiés.
Pour ces nouveaux gestes, ces nouvelles procédures, je sais pouvoir compter sur l’expertise et l’engagement de notre service de santé et de secours médical. Nous comptons sur vous chers collègues médecin, infirmiers et pharmaciens.
Par ailleurs, certaines missions – parce que personne ne veut ou ne peut les faire – relèvent de l’assistance, sans caractère d’urgence. Notre cadre d’actions doit évoluer avec des procédures adaptées : délais, matériels, ressources mobilisées.
Tous ces changements sont déjà en place dans quelques SDIS. Il est temps de généraliser ces pratiques au profit de tous.
Désormais, il ne s’agit plus pour les sapeurs-pompiers de concourir au Secours d’urgence aux personnes, mais bien de mener, derrière vous Monsieur le Ministre, cette politique publique, avec une véritable capacité à innover et expérimenter.
Pour appuyer cette politique publique, il nous faut aussi poursuivre certains chantiers.
A commencer par NexSIS, notre système national de gestion de l’alerte et des opérations.
Le pilotage de nos missions, la réponse opérationnelle et les relations interservices en seront améliorées, tout en faisant des économies.
Nos inquiétudes énoncées devant vous l’an dernier sont aujourd’hui levées.
Grâce à l’accord financier trouvé entre l’Etat et les élus, ce projet avance vite et bien.
Autre volet, notre place affirmée dans la gestion des crises.
La clause de revoyure de la réforme des emplois supérieurs de direction qui est en cours est une opportunité à saisir pour en améliorer le point faible : nos modalités d’accès aux postes à l’État.
C’est la condition, nous le rappelons année après année, pour que les besoins des territoires soient totalement pris en compte.
La transformation de la politique publique de Secours d’urgence est aussi une opportunité pour affronter la plaie que représente les agressions dont sont victimes les sapeurs-pompiers.
De plus en plus fréquentes et violentes.
Pas uniquement dans les cités sensibles. Mais désormais par des personnes de toutes conditions sociales, dans toutes sortes d’environnements.
Il y a quelques jours, l’un d’entre vous, président d’Union départementale, me faisait part du désarroi de ses collègues, de leur sentiment d’impuissance face à ce nouveau risque, face à ces missions qui nous conduisent à affronter les détresse sociale, psychologique ou psychiatrique, nous qui sommes avant tout préparés pour aller au feu ou secourir des polytraumatisés.
Monsieur le Ministre, dans les casernes, nos collègues attendent des réponses concrètes.
Votre instruction aux préfets en mars dernier et l’expérimentation prochaine de caméras piétons sont, certes, un début.
Bien-sûr, la réponse de la chaîne pénale doit aussi être à la hauteur, du traitement des plaintes jusqu’à l’application des sanctions.
Mais la mort atroce de Geoffroy HENRY à Villeneuve-Saint-Georges, témoigne, hélas, qu’il faut aller plus loin.
Une meilleure prise en compte de l’alerte, une meilleure collaboration avec les forces de l’ordre, une meilleure formation des sapeurs-pompiers – sont autant de facteurs à même de limiter les risques dans ces missions toutes particulières de secours d’urgence aux personnes.
Pour cela aussi, cette nouvelle politique publique du Secours d’urgence aux personnes aura un impact.
Cet impératif de protection appelle aussi une action pragmatique pour prémunir les sapeurs-pompiers contre les risques de contamination liés aux fumées toxiques. Là aussi, les SDIS, notamment les plus petits d’entre eux, ont besoin de l’État pour les accompagner dans cette évolution culturelle.
Ce souci de protection des femmes et des hommes qui composent notre exceptionnelle ressource humaine m’amène, à la deuxième grande transformation nécessaire, celle d’une politique nationale ambitieuse pour le volontariat en tant qu’engagement altruiste.
En mai dernier, la Mission Volontariat vous remettait son rapport.
Nous formulions 43 propositions. Celles que nous ont demandées les sapeurs-pompiers de France, massivement consultés par les co-rapporteurs.
Toutefois, et nous l’avons indiqué avec force, la cohérence de cet ensemble est subordonnée à un choix préalable.
Celui de réaffirmer solennellement le volontariat comme un engagement altruiste.
Ce choix est d’abord un choix de valeurs.
Le Premier ministre le disait justement il y a quelques jours à propos du futur service national universel : « la France a besoin de citoyens solidaires, responsables et engagés. »
Nous gardons aussi tous en tête les paroles fortes du Président de la République le 6 octobre dernier : « Je défendrai farouchement le modèle reposant sur le volontariat des sapeurs-pompiers qui n'est ni du salariat ni du bénévolat. »
La Mission Volontariat l’a écrit : notre modèle a trop dérivé, en voulant transformer le volontaire en professionnel à temps partiel !
Mesure-t-on les conséquences d’une telle rupture ?
A budget constant, seuls cinquante mille pompiers contractuels pourraient être recrutés… pour 12h par semaine.
Avec comme prix, la disparition de la ressource volontaire « altruiste », comme dans tous les pays qui ont créé un tel statut ! Vous avez cité la Suède il y a quelques jours M. le Ministre.
Quelle formule d’adieu aurons-nous pour les 150 000 citoyens volontaires, auxquels vous demanderez de mettre leur engagement altruiste au rancart ?
Au profit de 50 000 d’entre eux…
En Belgique, cette dérive a conduit au fameux arrêt MATZAK de la Cour de Justice de l’Union Européenne.
En assimilant nos collègues belges à des travailleurs au sens de la Directive européenne sur le temps de travail, il soulève des inquiétudes profondes et légitimes.
Dans les casernes, les sapeurs-pompiers volontaires, dont la plupart ont un emploi à temps plein, s’interrogent.
Devrais-je, en sortant du travail, respecter un repos quotidien de sécurité de 11h avant de pouvoir partir en intervention ?
Ne pouvant pas dépasser 48h de travail par semaine, que devrais-je choisir : mon emploi ou mon volontariat ?
Cette inquiétude n’est pas que la nôtre ! Tous nos collègues européens dont le modèle de secours repose sur le volontariat, la partagent - nos amis allemands en premier.
Sans compter la contagion de la menace : si demain, notre volontariat est remis en cause, après-demain, ce seront les réserves opérationnelles de la police, de la gendarmerie et de l’armée ! Puis ce sera le mouvement associatif et peut-être même les élus locaux ? Un adjoint n’est-il pas soumis aux instructions de son maire, convoqué à des réunions et indemnisé ?
Moins de présence dans les territoires, moins de réponse aux situations de détresse, plus aucune capacité de montée en puissance : est-ce la voie que nous souhaitons prendre ?
Non bien-sûr !
Au contraire, la voie à emprunter est claire, la Mission Volontariat l’a dit avec force : c’est réaffirmer l’engagement altruiste, accroître les effectifs de volontaires et diminuer la charge opérationnelle pesant sur chacun d’entre eux.
Seul ce choix stratégique permettra de rendre soutenable l’engagement individuel de chaque volontaire, et en même temps, de disposer de la ressource collective nécessaire pour répondre, partout, aux demandes de secours et aux crises. Le tout, pour préserver la santé et la sécurité des intervenants… parce que pour nous aussi, c’est important et nous n’avons pas le droit de faire n’importe quoi.
Ce choix stratégique, ce choix de valeurs, ce choix de raison, c’est d’abord un choix politique.
Votre choix, Monsieur le Ministre, en tant que responsable de la sécurité des Français.
Le choix du Gouvernement, car de nombreuses autres politiques publiques sont impactées par l’état de nos capacités opérationnelles.
Le choix du Président de la République, qui, le 6 octobre dernier, concluait par ces mots son discours de remerciements aux forces mobilisées durant les catastrophes de l’été 2017 :
« La République, elle se tient par cet engagement. Ce n’est pas un décret, une loi, un texte qui fait la République ; c'est ce souffle qu'il y a dans chacune et chacun d'entre vous qui fait qu'on se dépasse quand les moments durs sont là, qui fait qu'on se dépasse quand on sent l'angoisse et le besoin chez nos concitoyens, qui fait qu’on est ce point de repère, celui ou celle qui sauve. Vous étiez là à ce rendez-vous, alors la République est fière de vous et la République continuera dans les années qui viennent, à accompagner ce que vous êtes parce que nous en avons besoin. »
Monsieur le Ministre, vous avez le devoir de protéger et même plus, de nourrir ce souffle, cet engagement.
Après l’avoir dit ce mardi devant la représentation nationale :
Dites-nous ce matin que la Directive européenne de 2003 ne s’appliquera pas aux sapeurs-pompiers volontaires de notre pays !
Dites-nous pour cela que vous allez prendre, au nom de la France, l’initiative d’une règle européenne spécifique pour protéger l’engagement des forces de sécurité et de secours d’urgence .
Et surtout, pour ne pas affaiblir la protection des citoyens !
Voilà une noble ambition à proposer aux États-membres lors du renouvellement des institutions européennes l’an prochain, pour répondre à l’aspiration des peuples à une Europe qui protège !
De votre choix – fondamental ! - dépend l’efficience des propositions de la Mission Volontariat.
Nous espérons qu’elles auront largement inspiré le plan d’action que vous allez nous présenter au nom du Gouvernement, et qu’il soit lui aussi innovant et ambitieux.
D’abord, pour créer un choc de recrutement, en structurant les premières années de l’engagement volontaire autour des interventions du Secours d’urgence aux personnes.
Puis pour diversifier ce recrutement, avec par exemple :
- une action vigoureuse et globale en faveur de la féminisation, allant de l’adaptation des locaux à la lutte contre les stéréotypes ;
- la mise en place d’une véritable coproduction entre les SDIS et notre réseau associatif, pour développer les jeunes sapeurs-pompiers et valoriser leurs animateurs ;
- ou encore, la définition d’un cadre pour pérenniser les corps communaux de première intervention, très nombreux dans ce département et dans le quart nord-est de notre pays.
Ensuite, pour faciliter la disponibilité et l’engagement des sapeurs-pompiers volontaires, avec trois mesures essentielles :
- en direction des employeurs privés : un mécanisme simple et accessible, fiscal ou social, de compensation des charges ;
- en direction des collectivités locales : en cas d’accident ou de maladie en service de leurs agents volontaires, la prise en charge par le SDIS de la protection sociale ;
- en direction des volontaires : le bénéfice d’autorisation d’absence accordée aux salariés – qui d’ailleurs pour les réservistes opérationnels de la Garde nationale viennent d’être portées de 5 à 8 jours. Pourquoi une telle mesure n’est-elle pas transposée aux sapeurs-pompiers volontaires ?
Également, pour renforcer les gestes de reconnaissance et de fidélisation.
- Les nominations de sapeurs-pompiers volontaires dans les ordres nationaux du Mérite et de la Légion d’honneur ne peuvent rester au niveau indigent où elles sont tombées, indépendamment de la réduction globale des contingents.
Il en est de même pour la médaille de la sécurité intérieure où nous sommes encore loin derrière d’autres force de votre ministère.
- Mais surtout, les sapeurs-pompiers attendent, depuis 40 ans, une bonification de retraite. Longtemps, il nous a été opposé la multiplicité des régimes de retraite. Le projet d’unification de ces régimes change la donne, et permet désormais d’envisager ce puissant témoignage de reconnaissance, au titre de la solidarité nationale.
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Avec la transformation nécessaire, tant pour le secours d’urgence aux personnes que pour le volontariat, j’en arrive à la troisième et dernière grande transformation nécessaire. Elle concerne tous les citoyens : ils doivent devenir, réellement, les premiers acteurs de leur sécurité et le premier maillon de la chaîne de secours.
Deux chantiers initiés par le Président de la République doivent nous permettre d’y aboutir.
Le premier : former 80% de la population aux gestes qui sauvent.
Nous sommes aujourd’hui à moins d’un tiers.
La dynamique citoyenne observée après les attentats de 2015 et 2016, et la Grande Cause nationale que nous avons portée, doit être entretenue.
Par son ampleur, cette ambition requiert désormais la mobilisation des pouvoirs publics et de notre société.
C’est l’objet du plan d’action annoncé lundi dernier en Conseil des ministres.
Il reprend, et je m’en réjouis, l’essentiel des propositions qu’avec Patrick PELLOUX, nous avions formulées l’an dernier, à travers :
- la formation de 100% des jeunes au PSC1 en classe de 3ème ;
- et la mobilisation des ministères, des collectivités locales et des entreprises.
Deuxième chantier : le service national universel.
Quelle formidable opportunité pour nous de diffuser la culture de l’engagement, les valeurs de la République et le respect des institutions, en favorisant un regard positif sur notre service public.
Mais aussi, de contribuer à l’enseignement des gestes et comportements qui sauvent.
Et bien sûr, de susciter des vocations d’engagement comme sapeur-pompier volontaire.
Le rapport remis au Président de la République par la mission Ménaouine le prévoit.
Les sapeurs-pompiers de France, actifs et anciens, sont prêts à s’engager dans ces deux chantiers majeurs de citoyenneté.
Proposée par la Mission Volontariat, la création d’une réserve bénévole de sapeurs-pompiers pourrait y contribuer.
Mais il y a pour cela un préalable : quelle place pour les sapeurs-pompiers dans ce dispositif ?
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Monsieur le Ministre, mes chers collègues,
Moderniser l’organisation et le pilotage du secours d’urgence aux personnes,
Conforter le volontariat comme un engagement altruiste,
Faire de nos concitoyens les premiers acteurs de leur sécurité grâce aux gestes et comportements qui sauvent.
Voilà les trois transformations majeures à accomplir pour conforter notre modèle de secours, le pérenniser et toujours mieux répondre aux demandes des populations, dans chacun de nos territoires.
L’avenir, l’intérêt général : dans la lignée de mes prédécesseurs, ce double cap a toujours guidé mon action, durant ces 7 années.
En faisant toujours, le pari de l’intelligence et de la coopération, plutôt que du dogmatisme et de la confrontation.
Mais sans jamais rien abdiquer sur l’essentiel : ce qui fait au quotidien la force et l’efficacité de notre engagement.
A l’issue de ce congrès, je passerai la main à Grégory ALLIONE.
Ce choix, je le fais avec confiance.
Confiance dans la force de notre collectif : notre réseau associatif et mutualiste, plus puissant et solidaire que jamais.
Confiance, car avec Grégory, vous aurez un Président qui depuis son plus jeune âge, pense et vit intensément comme un sapeur-pompier.
Un chef qui connaît, par son expérience, les différentes formes de notre engagement, nos institutions fédérales, la nécessaire attention à porter à la diversité de nos territoires, ainsi que les sphères de l’Etat.
Un homme qui dispose de l’intelligence, du caractère et de l’énergie pour défendre et porter haut la voix des sapeurs-pompiers de France, et relever les défis qui nous attendent, dans l’hexagone et au niveau européen.
Confiance, parce que vous lui avez donné, par vos suffrages, la légitimité et la force politique nécessaires pour accomplir sa mission.
Confiance, parce que je sais qu’il pourra compter, au sein du Conseil d’administration et du Comité exécutif, sur une équipe riche de sa pluralité, forte et soudée.
Soudée par nos valeurs partagées et par cette indéfectible amitié que je garderai, toujours, au plus profond de mon cœur.
Ce choix, je le fais avec sérénité.
Celle du devoir accompli, et avec la belle perspective de retourner à ce qui est pour moi le plus beau des métiers : celui de chef de corps, tout en continuant à vous servir comme simple membre de la Fédération.
Ce choix, je le fais aussi avec une profonde admiration.
Celle que je vous porte mes chers amis.
Pour ce que vous faites au quotidien au profit de la population, au profit de vos collègues sapeurs-pompiers dans notre formidable réseau.
Je garde en moi le souvenir de la chaleur de vos accueils et de la franche camaraderie qui présidait à nos échanges, lors de chacune de nos rencontres.
L’admiration que je vous porte me permet de vous dire, que vous êtes plus que jamais des héros de l’impossible mais un impossible que vous rendez tous les jours possible.
A toutes et à tous, je vous souhaite bon vent.
Bon courage à toi, cher Grégory,
Vive les sapeurs-pompiers de France !