Les exposants qui répondent au risque d'agressions
[MAG] Caméras individuelles, vitres renforcées ou gilets pare-balles… Certains produits exposés au congrès de Bourg-en-Bresse tentent de répondre à la problématique des violences envers les sapeurs-pompiers.
Dans les travées du 125e congrès de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, quelques accessoires inattendus montrent que les agressions de pompiers sont l'un des enjeux du moment. Caméra piétons, pare brises renforcés ou gilets pare-balles, sont en effet désormais présentés aux soldats du feu qui n'en demandaient pas tant.
Caméras piétons
Sur le stand d'Axon, des caméras piétons sont exposés sous un panneau annonçant "La preuve en direct"."Il y a quelque mois nous ne pensions pas venir au congrès", assure Cathy Robin, directrice France de la société. Si elle a finalement décidé d'être présente à Bourg-en-Bresse, c'est qu'entre-temps la loi a autorisé, à titre expérimental pour une durée de trois ans le port de caméras individuelles par les sapeurs-pompiers et l'administration pénitentiaire.
Portée de préférences sur le buste au moyen d'un système d'accroche modulable selon l'équipement qui le reçoit, les caméras proposées par Axon fonctionnent selon un système de mémoire tampon qui lui permet d'enregistrer les deux minutes précédant le déclenchement de la caméra.
Le système est couplé avec un logiciel qui enregistre de manière sécurisée les données, afin que seuls les administrateurs y aient accès. Stockées sur le cloud ou en local selon la version choisie, les vidéos sont effacées automatiquement au bout de six mois, ainsi que le prévoit la loi qui encadre strictement le recours à de tels appareils.
"Nous prêtons le matériel dans le cadre des expérimentations", précise Cathy Robin qui explique être "en contact avec quatre Sdis" à ce sujet. Pour elle les caméras ont un effet de "dissuasion pour éviter le recours à la force" et permettent également de fournir "une preuve formelle irréfutable qu'on peut utiliser devant le tribunal".
Un peu plus loin, Sentinel, filiale de Balsan présente également les caméras individuelles qu'elle distribue. Là aussi, mémoire tampon et sécurisation des enregistrements sont de mise. Les premiers clients sont les polices municipales qui ont commencé à expérimenter ces objets il y a trois ans. La société assure fournir "270 communes sur les 340 qui sont équipées".
Vitres de véhicules renforcés
Autre stand offrant des protections aux pompiers en cas d'agression, celui de la société Plastrance. Ce transformateur de matières plastiques fournit des vitrages en polycarbonate aux CRS et aux gendarmes mobiles depuis 1987. "Nos produits permettent de répondre aux agressions dans le cadre du maintien de l'ordre, tels que jets de pierre ou cocktails molotov. Nous ne sommes pas dans la protection balistique", détaille Christian Eberhardt responsable commercial de la société. L'avantage des vitres renforcées est d'assurer la sécurité des personnels sans avoir un aspect trop agressif, comme avec des grillages de protection par exemple. Le cahier des charges prévoit une résistance des vitrages à trois impacts de 350 joules sur la même zone. A titre de comparaison, Christian Eberhardt estime à "60-70 joules l'énergie d'une boule de pétanque lancée à la main à pleine force".
Gilets pare-balles
Egalement dans le contexte de la protection des SP, sur le stand de la société Balsan, la présence d'un gilet pare-balles "sapeurs-pompiers" rappelle que ces derniers peuvent également être pris pour cibles. "Ce nouveau produit est de niveau 3A, c'est à dire qu'il respecte la norme américaine NIJ010104 et qu'il protège des armes de poing type 9mm ou 44 magnum", explique Alexandre Bardiani ingénieur recherche et développement chez Balsan qui précise qu'une "une plaque supplémentaire a été insérée pour assurer une protection contre les couteaux". Sa société a déjà vendu des gilets pare-balles "par exemple aux pompiers de Haute-Savoie", même si le besoin reste heureusement très minoritaire. Sur le stand de l'Ugap, dont l'objectif est d'assurer des commandes publiques groupées, le chef de produit incendie et secours Philippe Guinard assure que les commandes de gilets pare-balles concernent essentiellement les police municipales.
Texte : Matthieu Guyot de Saint Michel
Photos : Stéphane Gautier / Matthieu Guyot de Saint Michel
Les chiffres qui fâchent
En novembre 2017, une enquête de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) sur les agressions touchant les sapeurs-pompiers avait révélé une hausse de 17,6% de ce type de fait entre 2015 et 2016. Face à l'émotion suscitée par ces chiffres, le ministre de l'Intérieur a demandé aux préfets d'évaluer les protocoles mis en place entre les Sdis et les forces de sécurité pour prévenir les agressions. Les retours des préfets ont permis à la Place Beauvau d'identifier un certain nombre de bonnes pratiques et un train de mesures nouvelles transmises à l'ensemble des préfets, le 13 mars 2018.
Elles se répartissent dans trois champs:
- la coordination opérationnelle avec "des procédures spécifiques pour l'intervention dans les secteurs urbains sensibles (points de regroupement, itinéraires sécurisés et règles d'engagement adaptées, avec notamment l'appui de la police ou de la gendarmerie lorsque la situation l'exige) et par la mise en place d'un système d'évaluation régulière et partagée pour les secteurs où la fréquence des agressions ou de faits de violence urbaine est élevée" ;
- le dépôt de plainte et la protection fonctionnelle.
Les sapeurs-pompiers agressés peuvent prendre rendez-vous pour déposer plainte. et les enquêteurs peuvent auditionner les sapeurs-pompiers dans leur centre d'incendie et de secours. Par ailleurs, pour leur sécurité, ils peuvent se domicilier dans la procédure à l'adresse du Sdis.
- la formation : les sapeurs-pompiers peuvent être formés "à la négociation et aux techniques de défense simple (évitement, esquive, dégagement) face à une personne agressive".